💡 Quotidien, radio, télévision, presse lifestyle, sports, économie, judiciaire, people, etc. "Dans la Rédac", découvrez l’envers du décor de vos médias préférés… Toutes les deux semaines, nous allons à la rencontre de celles et ceux qui, chaque jour, font parler des autres et couvrent l'actu : les journalistes ! Leur quotidien, la conception qu’ils ont de leur métier, leurs anecdotes les plus folles, leurs parcours, le futur des médias… Vous saurez absolument tout ! 🤯
Pour notre deuxième épisode de “Dans la Rédac”, nous avons eu le plaisir d’accueillir Anaïs Corbin, journaliste chez BX1 ! Chaque jour, elle se consacre à la couverture de l’actualité locale bruxelloise pour la télévision et la radio. Sa particularité ? Son activité sur les réseaux sociaux, partageant avec passion les coulisses de ses reportages. Sans plus attendre, découvrez son quotidien et son engagement pour le journalisme local dans cette nouvelle édition de “Dans la Rédac”.
Ton premier contact avec le journalisme, c'était quoi ?
Pour moi, ça s’est d’abord fait à travers la télévision. Mes parents, étant Français, étaient fidèles aux journaux télévisés de France 2 ou de TF1. C’est donc au sein de notre foyer familial que j’ai eu mon premier contact avec le journalisme.
Plus tard, lors de mes études en Belgique, c’est mon professeur de français de deuxième secondaire qui m’a ouvert les portes des médias belges. Il débutait chaque cours par une petite revue de presse et apportait différents journaux papier que je récupérais systématiquement pour les lire à la maison. C’est ainsi que s’est développé mon intérêt pour les médias belges.
Et les réseaux sociaux, c’est venu comment ?
Comme un peu tous ceux de ma génération, je me suis inscrite sur Facebook alors que je n’avais pas l’âge pour le faire ! Mais mon intérêt pour le journalisme via les réseaux sociaux est vraiment arrivé il y a 4-5 ans sur Instagram, puis sur TikTok beaucoup plus récemment.
C’est donc sur Instagram que j’ai commencé à partager mon travail de journaliste. À l’époque, de nombreux médias cherchaient à rendre l’information plus accessible sur la plateforme, conscients que les jeunes y étaient présents. Ils comprenaient que pour atteindre cette audience, il était essentiel de créer un contenu engageant et adapté à leur langage.
À quoi ça sert, un journaliste ? Qu'est-ce que c'est le journalisme, pour toi ?
Je dirais que le rôle du journaliste est de nous aider à comprendre notre environnement, d’analyser les événements sociaux, et surtout de fournir une information juste et vérifiée. En gros, il agit comme un intermédiaire entre l’information et le public.
Le journaliste détient donc une grande responsabilité, car la manière dont nous consommons les médias influence notre compréhension de la société. Si l’on se limite à un seul média, cela confère un certain pouvoir aux journalistes qui doivent assumer une influence qu’ils doivent gérer avec précaution. La diversité des sources et des canaux que nous consommons façonne nos opinions, avec des conséquences sur des aspects tels que le vote et certains courants de pensée.
Lorsque tu prépares un sujet ou un reportage, comment ça se passe concrètement ? C'est quoi ton quotidien de journaliste ?
En tant qu’indépendante, je collabore régulièrement avec BX1, le média régional bruxellois, ce qui me conduit principalement à travailler en radio et en télévision.
Comme exemple de journée-type je vais prendre le domaine de la télévision car c’est ce qui parle le plus aux gens. Nous organisons des réunions éditoriales où nous examinons les événements des dernières 24 heures, qu’ils soient politiques, économiques, locaux ou liés à la mobilité. Les contraintes d’équipe, de temps et logistiques impactent directement les choix éditoriaux pour le journal télévisé. La sélection des sujets peut parfois dépendre des contraintes d’agendas des journalistes ou de leurs affinités avec certains sujets. Nous prenons également en compte les rendez-vous en rédaction, que ce soient des conférences de presse ou des sujets que nous construisons en appelant des personnes pour obtenir plus d’informations et voir si elles sont disponibles pour un tournage. Ensuite, nous passons sur le terrain pour les interviews et les prises de vue avec un cadreur, une phase qui dure généralement entre 1h et 1h30 en fonction du sujet. De retour à la rédaction, nous effectuons le montage, soit avec un monteur/monteuse, soit moi-même, selon l’organisation de la rédaction.
En parallèle, je partage sur les réseaux sociaux ce que je considère comme des sujets pertinents du JT ou des chroniques radio, que ce soit en story sur Instagram, sur LinkedIn, ou sur X. Lors des tournages, j’ai le réflexe de capturer des images avec mon téléphone, notamment lors de manifestations, pour partager en temps réel des vidéos, le nombre de participants, et d’autres informations pertinentes. C’est un aspect important de mon travail, alliant la diffusion en direct d’informations et la création de reportages plus « traditionnels ».
Pourquoi est-ce aussi important, pour toi, d’intégrer les réseaux sociaux dans ton métier ? Sachant que ce n’est pas ce pourquoi la rédaction te paye directement.
Il y a plusieurs raisons, la première étant que je suis moi-même une grande utilisatrice des réseaux sociaux quand il s’agit de m’informer. Une habitude que beaucoup de gens de ma génération (25 ans) partagent. Bien que nous n’ayons pas grandi avec les réseaux, ils ont rapidement fait partie de notre adolescence. En remarquant que les jeunes de mon âge ne suivaient pas les journaux télévisés ni n’achetaient de journaux papier, je me suis demandé : “Comment s’informent-ils alors ?”. Et bien comme moi : en scrollant, en consultant des carrousels de médias sur Instagram et en partageant des infos pertinentes en story. C’est ce qui m’a inspirée à créer du contenu moi-même sur les réseaux sociaux.
La deuxième raison est liée à mon travail sur le terrain. Lorsque mon cadreur prend des plans et des images, il y a des moments où je reste à côté sans rien faire. C’est précisément dans ces moments que l’idée me vient de documenter les coulisses de mon reportage. Je trouve certains angles intéressants pour les réseaux sociaux et je capture des photos/vidéos que je partage en story, offrant ainsi un peu les backstages de mon travail. Des retours positifs dès mes premiers posts m’ont encouragée à poursuivre, surtout lorsque j’ai accès à des endroits auxquels le commun des mortels n’a pas accès. En plus, c’est amusant pour moi, c’est finalement une activité naturelle puisque j’étais déjà une utilisatrice active d’Instagram. Mes amis me taquinaient déjà en disant que je postais « 10 stories par jour », mais même si j’essaie de me calmer sur les stories trop perso, j’ai intensifié la pratique, principalement pour le professionnel, mais avec quelques touches personnelles quand même. C’est une manière de montrer que je ne suis pas seulement une journaliste, mais aussi une personne avec une vie quotidienne. Ça peut passer d’une conférence de presse le matin à la radio l’après-midi, pour finir devant ma télévision le soir, un contraste qui amuse parfois les gens.
Qu'est-ce qui fait la particularité de ton média ?
La première particularité, c’est qu’on ne traite que les sujets bruxellois.
Avant de rejoindre BX1, je ne suivais pas vraiment les infos locales à la télé. Je les voyais parfois sur les réseaux sociaux quand elles étaient partagées. Mais au fil du temps, j’ai réalisé que l’actu locale attire l’attention, car elle touche directement à ce qui se passe autour de nous. Des exemples simples, comme les soucis de circulation près de chez soi, intéressent pas mal de monde dans nos 19 communes. J’ai aussi noté que l’info locale manquait un peu sur les réseaux sociaux. Les gros médias nationaux parlent des grandes actualités, mais ils ne mettent pas toujours en avant ce qui se passe localement et pourrait intéresser directement les gens. Je pense que l’aspect local sur les réseaux sociaux est utile et pertinent, mais il y a encore une piste à explorer. Cela pourrait favoriser la création d’une communauté plus engagée, surtout chez les jeunes qui pourraient être intéressés par ce qui se passe près d’eux.
C'était quoi ton meilleur sujet jusqu'à présent ?
Mes meilleurs sujets sont souvent ceux qui ont le plus de sens pour moi, comme les reportages sur des sujets sensibles tels que les agressions sexuelles.
Un jour, j’ai réalisé un reportage sur une femme agressée par le patron d’une boîte de nuit, qui a accepté de témoigner anonymement. J’ai même eu le patron au téléphone, et c’était une expérience particulière. En tant que femme, j’étais naturellement touchée par cette situation, ce qui rend difficile la neutralité dans ce genre de cas. En tant que journalistes, notre défi est de trouver le juste milieu entre la neutralité nécessaire et l’émotion humaine, sans en abuser dans nos reportages. Ce n’est peut-être pas mon meilleur souvenir, mais c’est un reportage qui m’a fait dire : “D’accord, mon travail a un sens.”
Et puis ce qui montre sa qualité, c’est aussi lorsque l’info est reprise dans les autres titres de presse. On voit que l’enquête a eu de l’impact et touche un public très large.
À quoi ressemblera ton métier en 2030 ? Qu'est-ce qui va changer ?
Je pense que mon métier continuera d’évoluer, notamment avec l’évolution des réseaux sociaux.
Bien que les médias traditionnels resteront présents, leur consommation changera considérablement, avec des formats adaptés à ces évolutions. La digitalisation des médias, déjà en cours, devrait se poursuivre, remettant en question l’existence du papier, par exemple. L’intelligence artificielle pourrait également jouer un rôle en automatisant certaines tâches, comme la rédaction de dépêches ou la réécriture de communiqués de presse. Économiquement, la survie des médias reste une incertitude. Repenser le numérique pour rendre l’information payante semble être une piste, tout en préservant la qualité du journalisme. Le journalisme d’enquête et d’investigation continuera probablement d’être essentiel. En ce qui concerne la publicité, il y a un débat sur la manière de l’intégrer. Le financement des médias reste une question sans réponse claire, mais le développement de formats natifs spécifiques au digital pourrait être une voie à explorer, plutôt que de simplement partager des articles et des reportages sur les réseaux sociaux.