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“Dans la Rédac” de Télé MB avec Virginie Peeters

💡 Quotidien, radio, télévision, presse lifestyle, sports, économie, judiciaire, people, etc. "Dans la Rédac", découvrez l’envers du décor de vos médias préférés…  Toutes les deux semaines, nous allons à la rencontre de celles et ceux qui, chaque jour, font parler des autres et couvrent l'actu : les journalistes ! Leur quotidien, la conception qu’ils ont de leur métier, leurs anecdotes les plus folles, leurs parcours, le futur des médias… Vous saurez absolument tout ! 🤯

 

Pour le septième épisode de la saison 2 de Dans la Rédac, nous nous sommes entretenus avec Virginie Peeters, rédactrice en chef de Télé MB. Ensemble, nous avons discuté de son parcours, des particularités d’une rédaction locale, et de l’avenir des médias de proximité. 

C’est parti !

Tu es actuellement rédactrice en chef de Télé MB.
Quel a été ton parcours pour en arriver là ?

Honnêtement, je n’avais jamais envisagé une carrière de journaliste… 

 

Au départ, j’avais choisi des études en traduction, mais ce n’était clairement pas fait pour moi (rires). Je me suis alors inspirée d’une amie qui, comme moi, avait commencé en traduction avant de se réorienter en communication. Et, même à ce moment-là, devenir journaliste n’était pas dans mes projets. Je me voyais plutôt devenir attachée de presse.

 

Durant mes études, j’ai réalisé plusieurs stages : à Cockerill Sambre, à Radio Contact… puis, en dernière année, j’ai eu l’idée de tenter un stage dans la mode. J’ai contacté plusieurs marques à Paris et Hermès m’a répondu. Une opportunité incroyable en apparence, mais dès mon premier entretien avec une représentante à Paris, je me suis sentie complètement en décalage avec cet univers. Dès le lendemain, une amie de l’école appelait Télé MB pour postuler pour un stage, et je lui ai lancé la blague : “Ils n’auraient pas besoin d’une deuxième stagiaire ?” Et contre toute attente, la réponse était oui ! C’est simplement comme ça que j’ai atterri chez Télé MB.

 

Après trois mois de stage, j’ai terminé mon année scolaire, mais j’ai proposé de rester bénévolement. Je payais moi-même mes trajets et n’était pas rémunérée, mais cela m’a permis d’apprendre, de me perfectionner et surtout, de me faire une place au sein de la rédaction. Deux mois plus tard, je suis devenue pigiste, puis, petit à petit, je participais à tous les briefings matinaux et acceptais les sujets que personne d’autre ne voulait traiter. 

 

Le tournant de ma carrière est arrivé quand j’ai couvert l’affaire du dépeceur de Mons. J’étais sur tous les fronts pour suivre l’enquête et, un jour, le patron m’a appelée pour me dire : “Tu es l’indépendante qui nous coûte le plus cher, on va stabiliser ta situation.” Et voilà comment j’ai été embauchée.

 

Par la suite, lorsque notre rédacteur en chef a dû s’absenter pour une opération, j’ai commencé à le remplacer avec un collègue. Puis, tout naturellement, quand il a quitté son poste, j’ai pris sa place en juin 2021. 

 

Depuis le départ, tout s’est fait très naturellement… 

 

Quelles sont les particularités d'une rédaction locale par rapport à une rédaction nationale ? Et préfères-tu travailler en local ou aurais-tu aimé évoluer au niveau national ?

J’adore travailler en local, mais je pense que si j’avais eu l’occasion de travailler au niveau national ou même international, je l’aurais saisie. Cela dit, j’ai toujours eu une certaine appréhension face à l’échec et au refus, ce qui m’a empêchée de tenter ma chance.

 

La principale différence entre une rédaction locale et une rédaction nationale, c’est que la première est ancrée sur un territoire très limité. Cela peut rendre les choses compliquées, notamment lorsqu’il s’agit de remplir notre JT avec des sujets pertinents.

 

Dans un second temps, il ne faut pas oublier que les médias de proximité ont pour mission fondamentale l’éducation permanente. Leur rôle est de donner la parole à des associations ou des initiatives locales souvent invisibilisées par les grands médias.

 

Et travailler en local a ses avantages et ses inconvénients. D’un côté, on côtoie régulièrement les mêmes personnes, ce qui permet de tisser des relations de confiance. Par exemple, je peux facilement appeler les bourgmestres directement sur leurs numéros privés, ce qui simplifie les échanges. Mais d’un autre côté, cette proximité peut aussi devenir un frein. Lorsque des relations positives s’établissent avec certaines figures locales, il peut être délicat de traiter des sujets critiques les concernant. On peut ressentir un certain malaise à devoir “dire du mal” de personnes avec qui on s’entend bien. Puis, au bout de quelques années, on a plus vite fait le tour.

 

Comment s’articule une rédaction locale ?
Combien d’intervenants il y a-t-il et quel est ton rôle au quotidien ?

Dans notre rédaction locale, nous sommes une petite dizaine à travailler à temps plein : des journalistes généralistes, des journalistes sportifs, et moi. Ce n’est pas énorme, mais cela nous permet de couvrir tout ce qu’il y a à traiter dans notre région.

 

Au fil des années, l’équipe a beaucoup évolué. Nous avons perdu plusieurs collègues expérimentés, et nous accueillons régulièrement des jeunes recrues. Cela crée parfois un manque d’expérience, mais, en contrepartie, les jeunes apportent un regard neuf, notamment sur les réseaux sociaux. Cette fraîcheur est précieuse pour capter une audience plus jeune et proposer des approches différentes.

 

Quant à mon rôle, il consiste à superviser tout ce que l’on produit. Je visionne les sujets, je critique, j’apporte des remarques pour que l’on s’améliore constamment. Mais ce n’est pas toujours simple. À cela s’ajoutent d’autres responsabilités, comme remplir le JT – et croyez-moi, parfois, c’est un véritable casse-tête. Les imprévus et les urgences sont monnaie courante. Cela peut sembler chaotique, mais au final, c’est aussi ce qui rend notre métier stimulant.

 

 

Jacqueline Galand, ministre des Médias, a récemment annoncé son projet de réduire le nombre de médias de proximité, passant de 12 à 6. Quel est ton avis sur cette proposition ?

 

Si je devais donner un avis subjectif, c’est sûr que je ne suis pas 100 % pour. Mais d’un autre côté, je ne suis pas totalement opposée à l’idée de fusions entre médias de proximité, à condition qu’il n’y ait pas de conséquences négatives pour le personnel. 

Par exemple, si on fusionnait avec Antenne Centre, ça pourrait être intéressant. Ça créerait une sorte d’équilibre avec trois TV locales dans le Hainaut : Notélé, Télésambre et nous. Comme je l’ai mentionné, le gros défi, c’est le remplissage du JT. Quand on se base uniquement sur notre propre territoire, c’est parfois vraiment compliqué. Du coup, il faut être super créatif, aller chercher des initiatives intéressantes, parfois même un peu farfelues.

 

Sur le territoire de Télé MB, y a-t-il des événements majeurs que vous ne pourriez absolument pas manquer de couvrir ?


Oui, Mons compte plusieurs événements emblématiques
. Le Doudou, avec sa célèbre descente de chars et le combat, est évidemment l’un des temps forts qui reflètent notre identité locale. Il y a aussi la Pucelette à Wasmes et le festival de Dour, qui attire chaque année des milliers de festivaliers et constitue un rendez-vous majeur pour la région.

À côté de ces événements spécifiques, il y a aussi des sujets récurrents comme les élections ou la rentrée scolaire, qui restent incontournables pour tous les médias, même locaux. Le vrai défi, c’est que ces moments forts s’ajoutent à l’actualité quotidienne sans pour autant la remplacer, ce qui rend parfois la gestion de toutes ces informations assez complexe.

On voit d’ailleurs parfois des reportages faits par des TV locales dans des JT nationaux. Comment se passent les synergies avec les autres rédactions du pays et entre TV locales ?

Avec les autres médias de proximité, il y a beaucoup de collaborations. Par exemple, si j’ai besoin d’images d’une autre TV locale pour une raison ou une autre, on se les partage volontiers. Il arrive aussi qu’un sujet ait un angle local qui intéresse plusieurs télévisions locales. Dans ce cas, on peut se proposer mutuellement des séquences. Ces échanges concernent principalement les images et les sujets. Nous collaborons particulièrement avec Antenne Centre, mais aussi à l’échelle nationale avec la RTBF. D’ailleurs, la RTBF demande souvent aux télévisions locales de fournir un sujet par jour pour le JT de 13 heures.

 

Parfois, nos séquences sont utilisées sans qu’on en soit spécialement informés, mais cela ne pose pas de problème tant que Télé MB est bien créditée. Dans le domaine du sport, par exemple, quand une équipe de notre région rencontre une équipe de la région du centre, nous envoyons un journaliste et Antenne Centre fournit un caméraman, ou inversement. Ce type de synergies est bénéfique pour tous, notamment parce qu’il permet de réduire les coûts.

 

 

J’imagine que les médias locaux ont plus de contraintes budgétaires et humaines que les médias nationaux. Est-ce que c’est réellement le cas et comment tout ça influence-t-il votre production de contenus ?

Oui, clairement, c’est plus compliqué pour nous, et cela se reflète notamment dans les profils des journalistes. Pour revenir à l’une des premières questions, c’est d’ailleurs une grande différence entre les télévisions locales et les médias nationaux. Les journalistes spécialisés dans l’information locale sont les plus polyvalents. Ici, nous montons nos sujets nous-mêmes, ce qui n’est pas forcément le cas dans la plupart des rédactions nationales.

 

Il y a beaucoup de choses que nous apprenons sur le tas et que nous faisons nous-mêmes, simplement parce que nous n’avons pas la même force de frappe économique et humaine qu’eux. Cela nous pousse à être créatifs et autonomes, mais cela limite aussi parfois nos moyens d’aller plus loin dans certains projets.

 

 

Quel est l’avenir des télés locales selon toi ?

C’est assez particulier d’avoir créé des médias qui mettent en avant le tissu associatif, pour ensuite voir, il faut être honnête, les médias nationaux venir marcher sur nos plates-bandes parce qu’ils ont découvert que l’ultra-local, c’était intéressant. Je pense que l’avenir des télés locales est étroitement lié à celui de la télévision en général.

 

On vit dans une société de l’immédiateté où tout le monde, à son échelle, peut devenir journaliste. Chacun peut partager son avis avec un impact parfois équivalent à celui d’un média traditionnel, ce qui pose un vrai problème de recul critique. Internet est un outil formidable, mais il dilue parfois cette capacité à discerner les sources et la qualité de l’information.

 

Quant à la télévision, certains pensent qu’elle est vouée à disparaître, mais ce n’est pas mon avis. Le rendez-vous du JT, par exemple, continuera à exister. Ce qui va évoluer, c’est la manière dont les gens le consomment. De plus en plus, ils le regardent quand ils le souhaitent, pas forcément à l’heure de la diffusion. C’est une tendance déjà bien ancrée aujourd’hui.

 

 

Y y a-t-il un reportage qui t’a marqué plus que les autres ?

Clairement, c’est l’affaire du Dépeceur de Mons.

 

Pour une télévision locale, vivre une affaire comme celle-là, heureusement, ça n’arrive pas tous les jours. Mais professionnellement, c’était extrêmement enrichissant. Il fallait être constamment à l’affût, suivre chaque nouvelle découverte, comme un sac qui allait être déterré, et travailler aux côtés des médias nationaux et même internationaux.

 

C’était une histoire tragique, bien sûr, mais en tant que jeune journaliste de 24 ans, c’était à la fois fascinant et formateur. Ça m’a fait grandir très vite dans ce métier. Cette affaire m’a permis de plonger dans le monde judiciaire, d’apprendre beaucoup sur le droit, et surtout, elle m’a donné une vraie motivation au quotidien. J’avais hâte de me lever chaque matin pour aller sur le terrain.

 

On se donne rendez-vous dans deux semaines pour découvrir le prochain épisode de "Dans la Rédac" avec un•e journaliste belge emblématique !