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Comment j'ai fait pour sortir un livre sans maison d'édition : le guide !

Nathan Soret 20 août 2025
Comment j'ai fait pour sortir un livre sans maison d'édition : le guide !

Le 1er juillet 2025, mon livre "95 anecdotes de communication" était enfin disponible ! 392 pages où je dévoile, en 95 petites histoires personnelles, ce que j'ai vécu ces 15 dernières années dans le monde des médias, des réseaux sociaux, des agences... En somme, de la communication ! Quelques semaines après sa sortie, je peux enfin vous expliquer avec un peu de recul comment s'est déroulée sa conception, étape par étape.

Dès que l'idée est née (il y a 2 ans environ), j'ai eu le souhait de tout faire moi-même. J'entends par là : ne pas travailler avec une maison d'édition, même si nos activités à l'agence nous amènent à régulièrement collaborer avec elles.

Pourquoi le faire "à la dure", me direz-vous ? Pour deux raisons : 

  1. D'une part, parce que je voulais bénéficier d'une liberté totale, à la fois sur la date de remise du projet, mais aussi sur la forme du livre. Les maisons d'édition ont (et c'est bien normal) un objectif de rentabilité, et je ne voulais pas que ça ait une influence sur la manière dont je présentais les anecdotes. Et puis, je désirais proposer un prix qui soit le plus abordable possible (il a même été question de le rendre gratuit à un moment, avant de le fixer à 18€ tout rond), là où l'économie du livre m'aurait probablement obligé à monter le prix de vente à 20€ ou 25€.
  2. J'ai la chance, à l'agence, d'avoir à mes côtés des collaborateurs qui ont de l'expérience dans l'écriture et la relecture, mais aussi dans la mise en page et le graphisme. L'occasion était trop belle de les mettre à contribution et de comprendre comment fonctionnait l'édition, à la fois comme auteur mais aussi comme "chef d'orchestre" de cet ouvrage.

Poussé par plusieurs personnes de mon entourage, me voilà donc avec la volonté d'écrire un livre qui retrace mes 15 premières années dans le monde professionnel, avec son lot d'anecdotes et d'enseignements personnels. Pour autant, il a fallu que je me fasse violence : on ne parle pas d'un roman ou d'un livre théorique, mais d'un livre qui ressemble à s'y méprendre à une autobiographie !

C'était donc un exercice qui me semblait affreusement égocentrique et il a fallu quelques coups de pied aux fesses pour que je finisse par m’y mettre (ce qui a mis deux bonnes années, oups). J’avais peur de raconter des histoires qui n’intéresseraient que moi. Alors, en me creusant la tête, j’ai décidé de partager ces expériences sous forme de “95 anecdotes” (en référence au nom de l'agence, et donc mon année de naissance, tout simplement), dans lesquelles les lecteurs pourraient piocher ce qui leur parlait le plus. 

Voici comment je m'y suis pris.

📋 Table des matières :
  • 1. Comment écrire un livre : méthodologie et contraintes
  • 2. Corrections et relectures : un chantier qui ne se termine jamais
  • 3. Couverture et mise en page du livre
  • 4. Imprimer son livre : combien ça coûte ?
  • 5. Les prérequis administratifs et légaux
  • 6. Placer son livre en librairie et dans les magasins
  • 7. Les "coûts bonus" de l'auto-édition
1. Comment écrire un livre : méthodologie et contraintes

Tout d'abord, il a fallu décider de quoi j'allais parler et de comment l'orchestrer. J'ai donc dessiné une structure sous forme de 95 anecdotes, divisées par années. Il a été question à un moment de structurer ces histoires par "thématiques", mais j'ai finalement choisi l'ordre chronologique, qui permettait au lecteur de mieux comprendre mes décisions de vie au fur et à mesure des anecdotes. 

  • Dessiner un squelette

J'ai donc commencé à me rappeler de différentes histoires marquantes et à noter des titres à la volée dans les notes de mon téléphone. En quelques minutes, j'en avais déjà une cinquantaine. Comme j’ai une mémoire un peu (trop) sélective, je me suis mis à envoyer des messages à quelques proches : “Tu te souviens de trucs qui me sont arrivés ces dernières années ?”. Petit à petit, et grâce à leur aide, les souvenirs me sont revenus et j'ai rapidement constitué un premier squelette d’une centaine d’anecdotes. J'ai également fouillé dans les photos de mon téléphone ou sur les posts archivés depuis longtemps sur Facebook ou Instagram, afin d’épingler l’un ou l’autre souvenir croustillant.

  • Premier essai : tout raconter oralement (spoiler : j'ai failli abandonner le projet)

Avant d'écrire la moindre ligne, le plus gros défi a d'abord été psychologique : en 2025, comment arriver à travailler sur un chantier de longue haleine comme celui-là sans être interrompu (volontairement ou non) toutes les 30 secondes par mon téléphone ? J'ai beau avoir commencé ma carrière avec les blogs et le journalisme, j'ai le sentiment que je n'arrive plus à écrire de textes plus longs qu'un post LinkedIn.

À l’agence, ma collègue Pauline Chaudat a l’habitude des longs formats. Elle planche d’ailleurs à cette même période sur plusieurs projets de livres de son côté (dont celui de l'émission Face au juge, sorti finalement un peu avant le mien). Chez nous, elle est copywriter, donc autant dire qu’elle a l'habitude d'écrire ! J’ai le sentiment que je n’arriverai pas à faire le premier jet moi-même, même avec une table des matières déjà bien étoffée. Elle propose alors qu'on organise quelques rendez-vous de plusieurs heures où je lui raconterai oralement chacune des anecdotes, de mémoire. J’ai besoin de verbaliser pour que les souvenirs remontent, ça tombe bien ! Une fois qu’elle aura écrit la structure principale, je passerai ensuite sur chacun des textes pour reformuler et ajouter quelques oublis.

Les mois passent et les premières anecdotes se dessinent. Mais la vie de l’agence puis celle de jeune papa me rattrapent. Toutes les semaines, pendant les réunions d’équipe, Pauline me regarde du coin de l’œil, l’air de dire “Bon, je lui en reparle ou pas ?”. À chaque fois, je trouve de nouvelles excuses. L’onglet du Google Doc sur lequel on travaille tous les deux reste tristement ouvert sur mon navigateur pendant des semaines. Un jour, je me surprends même à fermer cet onglet, prêt à tirer un trait sur ce projet qui me semble être trop compliqué à concrétiser. 

  • Second essai : s'enfermer et s'y remettre pour de bon

Au milieu du mois de mai 2025, je prends une décision radicale : je m’enferme trois jours dans une chambre d’hôtel sur la côte belge, face à la mer, et je coupe mon téléphone. Ça y est, il est temps que je m'y mette pour de bon !

Je me plonge sur ce document, et je me jure de ne pas sortir tant que les 95 anecdotes ne sont pas terminées. À la relecture du document, je réalise que Pauline a passé énormément de temps sur ce projet, mais je suis pris de honte : comment est-ce possible que je n'y ai pas davantage contribué moi-même ? Qu’est devenu le Nathan qui prenait du plaisir à écrire ? 

Je prends une décision radicale : je repars d’une feuille presque blanche et je me replonge virtuellement en 2009, date à laquelle commencent mes anecdotes professionnelles. Ça y est, je sens que ça me revient : le premier jour, j’écris tellement que j’en oublie de manger. Je lève la tête à 23 h et je vois une mer noire face à moi, avec quelques éclairages de bateaux au loin. J'écris, aussi rapidement et efficacement que possible.

Deux jours plus tard, je quitte la côte belge avec une trentaine d’anecdotes : ça ne sera pas aussi rapide que prévu, mais au moins, la machine est dégrippée. À partir de ce moment-là, je ne m’arrête plus. Chaque heure de libre, le week-end ou même la nuit, j’avance autant que je peux. Le projet que je traîne depuis presque deux ans est en train d’être entièrement réécrit en quelques semaines. Je prends environ une heure par anecdote, parfois un peu plus, le temps de plonger dans mes mails (jamais supprimés depuis 15 ans), mes photos, d’anciens articles, pour retrouver des détails oubliés.

  • L'annonce du livre (qui est encore en pleine écriture)

Alors que mes mains sont dans le cambouis, je décide de me rajouter une pression supplémentaire pour ne plus faire marche-arrière. Je fais une fixation sur mon passage à la trentaine, le 7 juin 2025. Au lendemain de mon anniversaire, je publie sur mes réseaux sociaux une photo pour annoncer la sortie du livre. Je prévois une sortie pour le 1ᵉʳ juillet (trois semaines plus tard) pour me rajouter un coup de pression supplémentaire. Je remets les gaz pour clôturer l’écriture à temps, et que le livre soit prêt avant les vacances d'été.

2. Corrections et relectures : un chantier qui ne se termine jamais

Une fois le premier "gros jet" du livre terminé, il me reste une semaine avant l'impression. S'enclenche alors une course contre-la-montre pour corriger et relire en trois jours les 200 pages A4 du Google Doc auquel j'étais venu à bout. C'est à ce moment-là que Pauline revient dans la course, épaulée par Kevin Peeters, chef de projet à l'agence (et passionné d'orthographe à ses heures perdues). 

Tour à tour, ils lisent mes textes, proposent des corrections, font des suggestions éditoriales, épinglent des erreurs d'inattention, débattent sur des règles orthographiques aussi loufoques les unes que les autres. Je repasse moi-même deux à trois fois sur l'ensemble du livre et je me surprends à découvrir de nouvelles fautes. Même après dix relectures de la même page, il arrive qu'une coquille réapparaisse sous nos yeux. C'est à devenir dingue ! 

On convertit le format du Google Doc d'A4 à A5 (le format classique d'un livre) et, mécaniquement... le nombre de pages double ! Il y en a maintenant presque 400. Je réalise alors que, vu le nombre colossal de pages, on trouvera quoi qu'on fasse à chaque relecture, un petit couac par-ci par-là. Je finis par l'accepter et le texte arrive enfin dans les mains de Lucas Soret, notre graphiste. 

Est-ce que des coquilles ont été trouvées depuis que le livre est sorti ? Oui, mais seulement deux pour le moment ! Un mot qui se répète, et une lettre manquante sur un prénom. C'était sûr, ça devait arriver !

3. Couverture et mise en page du livre
  • La couverture : un débat long de 2 ans... jusqu'à la dernière minute !

La couverture du livre a animé bien des débats avec Lucas, le graphiste de l'agence. Et ce, alors qu'on n'avait que le titre entre les mains. Ma seule certitude, c'est que je ne voulais pas mettre ma tête dessus. Le contenu était déjà bien assez personnel, pour que j'en rajoute une couche dès la couverture. Était-ce un mauvais choix ? En tout cas, je ne le regrette pas. 

J'étais ouvert à quelque chose de conceptuel, mais il fallait que ça marque au premier coup d'oeil. Quelques semaines avant l'annonce, Lucas me fait plusieurs propositions. En voici quelques-unes qui avaient retenu mon attention :


J
J'aimais bien le duo de couleurs rouge/bleu, qui rappelait d'ailleurs notre canette de "95 Juice" sortie fin 2023. 
L
L'idée ici était d'avoir des sortes de "dossiers" thématiques, qui représentaient quelques-unes des 95 anecdotes du livre.
Celle-là avait fait mouche chez pas mal de gens dans l
Celle-là avait fait mouche chez pas mal de gens dans l'équipe, moi y compris. Mais j'avais peur qu'elle vieillisse mal (quand Apple changerait ses icônes) et qu'elle ne soit pas très "marquante" de loin.

On a longtemps eu comme favorite la première proposition, pour la couverture finale. Puisque le livre n'était évidemment pas encore imprimé, on a alors fait un shooting photo avec un autre livre (celui de Salvatore Curaba, pour la petite anecdote) pour venir y intégrer cette cover pour le post d'annonce.

Dimanche, la veille de la publication sur mes réseaux sociaux, je suis pris d'un gros doute. J'en parle à Lucas et il me dit d'emblée : "Je voulais te dire exactement la même chose". Jour du seigneur ou pas, on teste de nouvelles versions. 

La première qui sort est un concept graphique (déjà existant si je ne m'abuse) de petits carrés colorés, censés représenter les 95 anecdotes : 

Ça ne me parle pas, et pourtant Lucas a déjà passé la matinée dessus. On parcourt alors son fichier rempli d'ébauches et je m'arrête sur l'une d'entre elles, que je n'avais pas du tout remarquée auparavant. On fait quelques ajustements dessus, et ça y est : je le sens, on l'a ! La photo est adaptée, et le livre est présenté le lendemain : 

Hé non, ça n
Hé non, ça n'est pas le vrai livre que je tenais entre mes mains...
  • La mise en page du livre : ce que j'avais complètement sous-estimé

S'il y a bien une tâche qui me semblait simple de prime abord, c'est la mise en page du livre. Lucas avait beau me dire : "Mais Nathan, c'est la première fois que je fais ça, je n'ai aucune idée de comment ça fonctionne", je pensais sincèrement qu'il "suffisait" de copier-coller tout mon Google Doc dans un modèle InDesign et basta. Ce qui devait selon mes estimations durer un jour ou deux, tout au plus, a donné de sacrées sueurs froides à Lucas. 

Il s'avère que le travail était bien plus manuel que ce que je pensais. On ne s'y est sans doute pas pris de la bonne manière, justement parce que c'était une première, mais chaque titre, sous-titre, catégorie stylisée, photo ou même retour à la ligne de ces 392 pages a dû être fait à la main. À refaire, je consacrerais probablement une bonne semaine à cette partie, en acceptant éventuellement de travailler avec un spécialiste en la matière (qui nous aurait fait gagner pas mal de temps). Qu'à cela ne tienne, le résultat final tenait tout à fait la route. Après l'impression, on a juste remarqué un bug de placement de texte dans les hauts de page (vers le milieu du livre uniquement), mais il faut vraiment le savoir pour le voir. Ceux qui se sont procurés le premier tirage du livre pourront le constater... Pour le deuxième tirage (j'y reviendrai), on a corrigé ce petit souci !

4. Imprimer son livre : combien ça coûte ?

Rentrons dans le cœur du débat : le coût réel d'un livre auto-édité. Là aussi, j'ai énormément appris en cours de route. Mon premier défi était de trouver un imprimeur sérieux, qui proposerait un rendu de qualité, dans un délai serré, sans pour autant faire exploser les prix. Alors que j'étais en pleine écriture du livre, j'avais estimé que ça devait coûter aux alentours des 10€ TTC, au maximum. 

Je me suis repenché dessus quelques semaines plus tard. Après avoir bien analysé plusieurs sites en ligne, je suis tombé sur le français "printoclock.com". Pour être honnête, le nom du site me donnait un peu un sentiment "low cost", ce qui m'inquiétait pour la qualité du livre, mais l'expérience utilisateur était plutôt bonne. En quelques clics, je pouvais choisir le type de livre, le format, le nombre de pages, le grammage du papier, l'intérieur, etc. C'était presque trop simple ! (promis, ils ne m'ont pas payé pour écrire ça).

Voici la sélection que j'ai faite :

- Type de livre : Roman
- Reliure : Livre souple
- Papier : 80G Bouffant - Crème - Munken 
- Papier de couverture : Premium 300g pelliculage mat
- Format : A5 fermé / A4 ouvert
- Couleur d'impression intérieur : Intérieur couleur
- Nombre de pages : 392

Imprimer un livre de ce type en couleur, c'est plutôt rare, de mon expérience. Mais comme on voulait y intégrer des photos et des encarts avec des catégories, ça me semblait être plus agréable. Cela faisait certes un peu augmenter le prix (entre 0,5€ et 1€ par unité dans mes souvenirs), mais ça en valait la peine.

Là où les choses se sont compliquées, c'est sur les délais de production. Le site propose un J+7, J+5 et J+3. Forcément, plus c'est rapide, plus c'est coûteux. Pour respecter la date du 1er juillet sur laquelle je m'étais engagé, j'ai fait à contrecœur le choix du J+3 (qui était par ailleurs limité à 250 exemplaires), mais qui faisait exploser le prix à l'unité de +2€. J'avais lancé les préventes du livre à 18€ depuis quelques semaines, alors tant pis, j'allais prendre en charge le surcoût. 

Allez, je ne fais pas durer le suspense plus longtemps. Le coût total de ce premier tirage, livraison (depuis la France) comprise, revenait à... 11,58€ HTVA à l'unité. Ce à quoi il faut rajouter la TVA (à 6% pour les livres) lors de la vente, donc un prix net à 12,27€ TTC. 

"Oohhhh mais ça va", me direz-vous, "Il te reste un peu plus de 5€ de marge par livre vendu". Oui, sauf que je n'étais pas au bout de mes surprises ! Mais j'y reviendrai un peu plus tard. 

Quand j'ai reçu ce premier stock, j'étais ravi : ouf, la qualité était au rendez-vous ! J'avais même l'impression que j'avais fait une affaire sur le prix d'achat. 

Youhouuuuuu, les premiers exemplaires du livre viennent d
Youhouuuuuu, les premiers exemplaires du livre viennent d'arriver !

Lorsqu'il a fallu commander un deuxième tirage dans le courant du mois de juillet, je m'y suis pris avec un peu plus d'avance. Le SAV de l'imprimeur a été génial et m'a vraiment bien accompagné dans cette nouvelle commande. J'ai cette fois-ci eu le sentiment d'échanger avec une boîte humaine, et avec un contact personnalisé. J'ai doublé la quantité, et j'ai pris la livraison la plus tardive. Celle-ci était plus coûteuse parce que vu la quantité, les livres seraient livrés par un transporteur spécifique, avec une palette. 

Pour cette deuxième commande, le prix à l'unité est descendu à... 7,72€ TTC ! Soit une différence de quasi 5€ avec la première commande. Et encore, si j'avais pris une couverture de moins grosse épaisseur, un nombre de pages réduit et en noir & blanc plutôt qu'en couleurs, j'aurais probablement eu un prix défiant toute concurrence. 

Je ne peux pas être plus transparent que ça ! J'espère que ces chiffres permettront à ceux qui veulent se lancer ou tout simplement en savoir plus sur le vrai coût des livres d'y voir plus clair. 

5. Les prérequis administratifs et légaux

L'un des plus gros mystères pour moi, en me lançant dans ce projet, c'était l'aspect légal et administratif. Par exemple : comment "créer" littéralement sa maison d'édition, comment "créer" un code-barre pour le livre, comment "déclarer" au monde que ce livre existe ? 

Voici les différentes étapes que j'ai fini par suivre :

  • Se déclarer comme éditeur à l'AFNIL et obtenir un numéro ISBN

Pour les ouvrages francophones (belges ou français), vous devez vous déclarer en tant qu'éditeur sur le site de l'AFNIL (Agence Francophone pour la Numérotation Internationale du Livre). Cela permet d'obtenir un numéro "éditeur" et plusieurs numéros "ISBN", qui seront ensuite reliés à un livre. Ce sont ces numéros qui permettent d'ailleurs de générer un code-barre (qu'on retrouve à l'arrière du livre). La démarche dure 3 semaines et coûte 35€ mais, vous commencez à me connaître, dans l'urgence j'ai dû payer 70€ pour obtenir ces numéros en 1 semaine. Une fois les démarches faites, vous recevez alors 3 numéros ISBN à utiliser librement sur vos prochains ouvrages.
Attention : ça n'est pas l'AFNIL qui vous fera devenir éditeur, elle ne vous donnera qu'un "préfixe éditeur" pour les futurs numéros ISBN. Pour être juridiquement éditeur, il vous faudra créer une entité (SRL, ASBL...) qui sera votre "maison d'édition". 

  • Intégrer son livre dans une base de données en s'inscrivant à la Banque du Livre

C'était un peu trouble pour moi, parce qu'il existe visiblement plusieurs "bases de données" qui sont utilisées par les librairies pour recenser tous les livres existants. J'ai fait le choix de la "Banque du livre" (qui porte également le nom de Dilicom) qui permet d'ailleurs aux auto-édités de s'inscrire gratuitement.

Après une demande d'information sur leur site, j'ai reçu quasi immédiatement le message suivant :
"Une présence dans notre base de données est généralement suffisante lorsque l'on débute. Pour vous permettre le référencement, nous devrons vous ouvrir un compte propre pour votre distribution. Pour accepter une adhésion ou une présence dans notre outil, nous vérifions certains points comme l'attribution d'un EAN (ISBN) pour chaque titre ainsi que votre démarche pour le dépôt légal auprès de la KBR. Nous vérifierons également que vos publications soient dans le respect déontologique du code civil et de l'individu (droits de l’Homme)."

Au téléphone, un représentant de la Banque du livre a même été particulièrement agréable avec moi, me soufflant quelques conseils pour l'auto-édition et les contacts avec les librairies. Je me suis surpris à passer 15 minutes au téléphone avec lui, bénéficiant de son expérience, alors... que je n'ai rien payé !

Une fois que le livre est officiellement inscrit sur la BDL, vous allez commencer à le voir apparaître PARTOUT. Sur Amazon (même s'ils n'ont pas de stock), sur des librairies belges, françaises, étrangères... PARTOUT ! C'est une sorte de mécanisme automatique : cette base de données est utilisée par tous les réseaux de vente (en ligne notamment). Ça n'a pas beaucoup d'intérêt, surtout que je ne vendais pas sur ces sites-là, mais sachez que c'est ce qui risque d'arriver.

  • Faire un dépôt légal (+ envoyer 2 livres) à la Bibliothèque Royale Belge

C'était inscrit dans le mail de la Banque du livre et, pourtant, je n'avais aucune idée que ça existait : tout éditeur a l'obligation légale de déclarer ses ouvrages auprès de la KBR (la Bibliothèque Royale Belge). Et aussi d'envoyer 2 exemplaires du livre, pour archivage dans les arcanes de la bibliothèque. J'étais plutôt étonné (25€ de marchandise en moins ! haha) mais on peut y voir un moment symbolique où votre livre est "sauvegardé" à jamais, pour la postérité. 

Une fois que l'ouvrage est déclaré, vous recevez un "numéro de dépôt légal" à inscrire au début ou à la fin du livre (attention à bien vous y prendre à l'avance, donc). Ensuite, vous avez 1 mois pour envoyer vos 2 exemplaires à la KBR. Bonne nouvelle : les étiquettes Bpost sont cette fois-ci gratuites et fournies par la KBR elle-même.


6. Placer son livre en librairie et dans les magasins

Ces étapes administratives franchies, il a fallu passer à la "distribution" du livre. J'ai clairement déchanté. Et pourtant, j'ai eu la chance de bénéficier d'opportunités inespérées. 

Depuis le début, j'avais imaginé ne vendre le livre que sur le site de l'agence, pour maîtriser mes coûts, être en contact direct avec chaque lecteur, et n'avoir qu'un seul canal à gérer. Et puis, je n'assumais pas vraiment de sortir ce livre, comme si je n'étais pas vraiment auteur, donc je ne m'étais jamais imaginé dans les rayons des grandes librairies.

Quelques semaines avant la sortie du livre, je reçois l'appel d'un ami, qui me demande des infos sur nos services en relations publiques. La discussion dure quelques minutes et, à la fin, il me rappelle qu'il travaille pour la Fnac. Je lui dis, presque pour rire : "Ah, tu sais que je vais de sortir un livre !". Il n'hésite pas une seconde et me répond "génial, ça ! Ça te dirait de faire une séance de dédicaces chez nous ?"

Je n'en crois pas mes oreilles ! Ça semble presque trop simple.

Le 11 juillet pourtant, me voilà en train de dédicacer plusieurs exemplaires à la Fnac Toison d'or. Et mon livre se voit quant à lui présenté dans les magasins bruxellois de la chaîne. Enfin, soyons honnêtes, ça n'a pas été si simple : comme je ne fais pas partie d'un réseau "classique" de diffusion/distribution, il a fallu que les responsables de la Fnac intègrent mon livre en "dépôt/vente" : je dépose un stock, ils vendent ce qui intéresse les acheteurs, je récupère les invendus au bout d'un certain temps et je leur facture les livres vendus.

Mon livre en tête de gondole à la Fnac.. La fierté !
Mon livre en tête de gondole à la Fnac.. La fierté !

Sur le papier, ça semble simple, mais j'apprends que plus personne ne fonctionne comme ça, même dans les "petites librairies". Tout passe par en général des réseaux de distribution bien huilés, ce qui fait que les auteurs auto-édités comme moi ont bien du mal à intégrer le circuit classique. C'est plus de travail pour tout le monde, ça complique les processus, donc ça ne se fait jamais. Sauf cette fois-ci : mon livre est finalement rendu disponible à l'achat, en échange d'une marge vendeur d'environ 35%. Vous me voyez venir ? Je vends à 11,7€ à la Fnac un livre qui m'a coûté... 12,27€. Littéralement, il faut que je paie 0,5€ par livre vendu. La situation est cocasse, mais l'occasion est trop belle et je me dis que ça m'aidera sûrement pour débloquer d'autres librairies. 

Je fais des pieds et des mains, je contacte plusieurs autres librairies dans tout le pays, mais je ne reçois… aucune réponse. Bien, au moins je sais ce que vivent les auteurs qui n'arrivent pas à trouver de maison d'édition pour leur bouquin.

Je commence à comprendre que sans diffuseur (qui propose les livres aux librairies) ni distributeur (qui s'occupe de la logistique), je ne vais pas aller bien loin. Je me mets alors en tête de contacter des distributeurs, persuadé d'avoir plein d'arguments à ma disposition (une présence à la Fnac, un intérêt d'une autre grosse chaîne, de la visibilité médiatique, etc.), mais rien n'y fait. La seule réponse que je reçois d'un distributeur me laisse pantois : "Un livre paraît normalement chez un éditeur qui a son réseau de diffusion et de distribution. Vous avez opté pour une auto-édition, à vous de contacter les diffuseurs belges pour une distribution". Je comprends alors que je n'irai pas plus loin dans mes démarches et je me contenterai de la Fnac de Bruxelles et d'une petite librairie verviétoise ("La Petite Libriaire") qui a bien voulu jouer le jeu !


7. Les "coûts bonus" de l'auto-édition

Je vous ai laissés sur le prix de fabrication de mon premier tirage à 12,27€. Sauf qu'il faut encore envoyer le livre, vu que les commandes se passent sur le site de l'agence. Je tiens à ce que l'emballage soit agréable et que la livraison se fasse jusqu'à l'acheteur. Sur le site, j'avais proposé un prix tout rond à 18€ (livraison comprise). Le but n'était clairement pas de gagner de l'argent sur ce livre, mais d'arriver plus ou moins dans mes frais. 

C'était sans compter sur le coût d'une livraison Bpost jusqu'à la porte de l'acheteur, qui coûte 6,85€ (!) par envoi. Ça peut baisser un peu si la livraison se fait dans un point relais, mais tout de même, c'est élevé. Vous voulez que Bpost vous imprime l'étiquette ? Vous me rajouterez 0,62€ par envoi ! (ça, j'ai préféré faire l'impasse). 

Et puis, pour que le livre arrive dans un bon état, il était nécessaire de l'emballer dans une enveloppe à bulles (personnalisée avec le logo de l'agence, rien de dingue). Entre ça, l'imprimante à étiquettes et le rouleau de papier d'étiquettes (plus cher que ce qu'on ne croit), rajoutez enfin environ 1€

Je mesure ma chance : je n'ai pas dû payer littéralement des relecteurs ou un graphiste, si ce n'est mon équipe qui a évidemment passé de nombreuses heures sur ces tâches. Mais c'est un coût qui ne doit pas être sous-estimé pour un auteur auto-édité.

Au total, un livre envoyé à l'unité aura coûté : 

  • Prix du livre : 12,27€
  • Coût de la livraison : 6,85€
  • Emballage et étiquette : 1€
  • TOTAL : 20,12€ (pour rappel, le livre est vendu à 18€)

Évidemment et heureusement, grâce au deuxième tirage, en lissant les coûts totaux, on finit par rentrer quasi comme il faut dans les frais. Mais est-ce que c'est à la portée de n'importe quel auteur ? Pas sûr... 


8. En conclusion : auto-édition ou maison d'édition ?

Vous l'aurez compris : il ne faut pas compter sur la vente de votre livre pour devenir riche. En revanche, j'ai trouvé du plaisir dans d'autres aspects de l'auto-édition. Écrire la dernière phrase du livre après des dizaines d'heures de travail, tenir l'ouvrage entre les mains pour la première fois, découvrir les précommandes et l'intérêt des gens... Recevoir des retours de lecteurs est probablement l'une des plus belles reconnaissances qui existe. 

Avec cette expérience, j'ai également appris à mieux comprendre pourquoi les maisons d'édition ont tendance à refuser la plupart des projets qui leur sont envoyés. Produire un livre nécessite l'intervention d'une multitude d'acteurs qui doivent chacun "gagner leur croûte". C'est une économie basée sur quelques centimes de bénéfices par-ci par-là, qui vacille lorsqu'un livre ne rencontre pas le succès escompté. Il suffit d'entendre comment les professionnels du livre parlent de la difficulté du secteur depuis des dizaines d'années pour comprendre que ça n'est pas simple. 

Je pense avoir également compris où se situait (selon moi) la vraie pierre angulaire de l'édition : les diffuseurs/distributeurs. Ce sont eux qui tiennent les clés de la vente d'un livre ou qui peuvent en tout cas en accélérer le succès. Avec du recul, je dirais que c'est ce qui m'a cruellement manqué sur cette sortie, et qui pourrait me pousser à passer par une vraie maison d'édition à l'avenir.

Pour autant, ça n'est pas toujours une question de "choix". Si l'auto-édition est inévitable pour vous, j'espère que cet article vous aura éclairés. Si vous avez la possibilité d'être édité par des professionnels, vous savez au moins ce qu'il se passe en coulisses !

Quoi qu'il en soit, malgré les galères, je ne regrette absolument rien de toute cette aventure... Et je sens qu'elle ne fait que commencer !

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